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La revue de presse Astrée
Succursales d’intermédiaires d’assurances hors EEE : ce que dit vraiment l’ACPR
Analyse du rappel ACPR sur les succursales d’intermédiaires d’assurance français hors EEE : gouvernance, conformité et responsabilités.
Un autre « passeport » pour exercer en France
Le secteur est en émoi depuis la publication par l’ACPR, le 23 juillet 2025, de ses attendus concernant l’exploitation par certaines sociétés d’intermédiation en assurances françaises d’établissements situés en dehors de l’EEE et pratiquant la distribution de contrats d’assurance.
Contexte: un sujet ancien ravivé
Ce sujet préoccupe les autorités depuis plus de quinze ans. Les pratiques de commercialisation depuis des plateformes situées hors de l’EEE (Maghreb, Proche-Orient, Asie) se sont multipliées depuis les années2010. L’ACPR avait déjà exprimé ses inquiétudes et publié une FAQ aujourd’hui disparue.
Les positions historiques de l’ACPR
L’ACPR indiquait clairement qu’il n’existe aucune disposition permettant à l’ORIAS de délivrer un « passeport » pour un pays horsEEE. De même, un intermédiaire établi en dehors de l’espace économique européenne peut pas pratiquer en France l’intermédiation en assurance.
Cependant, les salariés d’un intermédiaire français, même installés hors EEE, peuvent vendre des produits d’assurance en France à condition d’être liés par un contrat de travail, de respecter la réglementation française et de remplir les conditions de capacité professionnelle et d’honorabilité.
La structuration juridique des succursales étrangères
La distinction entre succursale et filiale
La succursale n’a pas de personnalité morale propre. Elle dépend juridiquement, fiscalement et comptablement de la maison mère située enFrance. Ce statut a été préféré à la création de filiales afin de garantir la maîtrise directe de l’activité.
Les diligences requises
Deux obligations majeures :
- la création d’une succursale étrangère consolidée dans la maison mère française ;
- la déclaration au greffe du tribunal de commerce de la succursale, par une mention portée sur le Kbis de la maison mère.
Ces démarches permettent à l’intermédiaire de démontrer un lien de droit et de subordination, condition essentielle pour le respect de la réglementation française.
Les exigences de gouvernance posées par l’ACPR
La notion de « substance juridique »
Reprenant la doctrine de l’EIOPA (février 2023), l’ACPR exige que la société mère française assure un pilotage effectif de lasuccursale et de ses salariés. Une gouvernance dédiée et sédentarisée en France doit être mise en place.
L’équilibre entre activité française et étrangère
L’activité principale doit rester exercée en France.L’ACPR sanctionne les structures « coquilles vides » qui ne servent qu’àjustifier une immatriculation ORIAS. La succursale doit rester secondaire etcontrôlée par la gouvernance française.
Les diligences recommandées
- Déclaration de la succursale sur le Kbis ;
- Déclaration nominative des salariés de la succursale à l’association d’autorégulation ;
- Contrats de travail mentionnant le rattachement à la maison mère française ;
- Formations professionnelles initiales et continues et attestations d’honorabilité ;
- Vérification de la couverture de la succursale par l’assurance RC professionnelle.
Les constats issus des contrôles de l’ACPR (2024–2025)
L’ACPR a constaté :
- des succursales étrangères sans pilotage réel ;
- des maisons mères françaises dépourvues d’activité effective ;
- l’absence de dispositifs de gouvernance dédiés ;
- des difficultés à contrôler les pratiques d’information et de conseil.
Ces constats rejoignent les observations de l’EIOPA :certaines structures ne sont que des façades administratives.
Enjeux juridiques et responsabilité
La protection de l’assuré
Le rappel de l’ACPR s’inscrit dans la logique de protection des assurés, justifiant la restriction de certaines libertés économiques. Le cadre juridique vise à garantir la loyauté et la conformité de la distribution.
Responsabilité des mandants et des animateurs de réseaux
Les donneurs d’ordre - maison mère, assureurs, courtiers grossistes - doivent intégrer dans leur gouvernance des procédures de contrôle de conformité de leurs salariés locaux et des partenaires exploitant des succursales à l’étranger.
L’obligation d’information et de conseil
Les salariés étrangers doivent respecter les mêmes obligations d’information et de conseil que ceux basés en France.
Une position ferme mais nécessaire
La communication de l’ACPR du 23 juillet 2025 ne crée pas d’interdiction des succursales : elle réaffirme une position constante et clarifie un cadre flou depuis la disparition de la FAQ historique publiée surson site.
Elle distingue les acteurs responsables, respectueux des règles, de ceux qui cherchent à contourner la réglementation.
En définitive, l’exploitation d’une succursale étrangère reste possible si la maison mère française démontre une gouvernance solide, une maîtrise réelle de ses activités délocalisées et une conformité stricte aux exigences du code des assurances.
IsabelleMonin Lafin – Astrée Avocats
Ce texte est un résumé de l'article complet disponible sur le site de l'assurance en mouvement ici.
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